L'effet Yvette Horner
Hommage à 水, jeune mélomane chinois
Le 10 novembre 2016 à 20h17, Sofiann, en plein coeur de sa période de vie à Guangzhou, et occupé depuis trop longtemps cette après-midi là à transcrire dans ses carnets le fruit de ses études, décide de s’aérer les idées en faisant honneur à une des coutumes locales.
Dehors, c’était en effet l’apothéose d’un phénomène démarré au petit matin dans de nombreuses allées pietonnes de la ville. Les vagues culturelles se succèdent dans la rue : calligraphie, danses, courses, arts martiaux, musiques, chants, marche et bien d’autres activités encore occupent les cantonais du matin jusqu’au soir. Chacun se met à sa routine artistique sans prêter attention à celle du groupe voisin tandis que des observateurs se campent ici et là, cigarette à la main.
Bien des fois, Sofiann s’était déjà fondu dans la masse en échangeant quelques passes de Tian Zi ou faisant résonner son accordéon.
Mais ce soir là, les conditions d’un évènement bien particulier se mettait en place ; un évènement qui allait confirmer une fois de plus la beauté du monde de la musique.
En effet, au même moment, non loin de là, dans le coeur d’activité bancaire de la ville, 水, analyste financier prometteur, quittait son travail, enfourchait son vélo et rentrait chez lui. Sa route empruntait, comme chaque soir, l’allée pietonne qui longeait le fleuve de la ville à l’heure de pleine effervescence.
Cependant ce soir là, des notes inhabituelles à ses oreilles l’arrêtèrent près d’un petit groupe derrière lequel s’animait son instrument favori. Sous l’effet de cet accordéon entrainé par les bras d’une personne visiblement pas du coin, il se laissa aller à l’écoute d’un morceaux, puis deux, puis trois et finit par s’avancer un grand sourire aux lèvres.
Sofiann lui répondit avec ce même sourire.
Là sur ce banc, face au défilé hétéroclyte, nous eûmes un bel échange sur la musique d’abord, sur la société chinoise ensuite, puis naturellement sur l’accordéon, cet instrument dont il rêvait de jouer depuis bien longtemps, lui qui s’était toujours restreint à son piano. Une idée rayonnait dans la discussion, celle du pouvoir de certaines impulsions amenées par la vie, petites en apparence mais qui nous poussent à de grandes avancées ; cette idée qui rappelle qu’il suffit parfois de réaliser qu’une chose nous paraissant impossible ne l’est pas pour basculer dans un monde nouveau.
Le lendemain soir, je recevais la photo suivante avec le texte suivant : “Te paraît-il de bonne qualité ? Je prends ?”
Et deux jours plus tard encore eu lieu notre premier échange poly-accordéonique.
Quelle ne fut pas ma surprise lorsque je l’entendis sortir ses premières notes, celles que vous entendez depuis les premières lignes de cet article.